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Coumba Gawlo

Toujours là !

Par Sabine.CESSOU
Publié le 14 mars 2015 à 10h43
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Que sait-on de la « diva à la voix d’or » du Sénégal ? Issue d’une famille de griots, elle remporte à 14 ans un concours national avec « Soweto », une chanson écrite par son père. En 1990, à 18 ans, elle sort sa première cassette, Seytane. Un gros succès, qui permet aux adolescents du Sénégal d’avoir enfin « leur » star. Le chanteur français Patrick Bruel la remarque et produit en 1998 son album Pata Pata. Du nom de ce morceau légendaire de Miriam Makeba dont la reprise lui vaut un disque d’or en Belgique et un autre de platine en France. Un tremplin pour lancer son label Sabar qui emploie une dizaine de personnes dans ses bureaux et son studio, situés sur trois étages dans le quartier de Sacré-Cœur, à Dakar. Sans compter les dix musiciens de son orchestre mené par Laye Diagne, guitariste chevronné. Elle a remporté les Kora Awards en 1999 en tant que meilleur espoir, puis en 2001 comme meilleure artiste pour l’Afrique de l’Ouest. Depuis, elle vogue de concerts en tournées, de nouveaux disques en succès, à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest. Voilà vingt ans qu’elle mène aussi sa fondation Lumière pour l’enfance, avec neuf permanents engagés pour l’éducation et les droits des filles et des femmes, contre les mariages précoces, les violences sexuelles et l’excision. Un combat qui lui tient à cœur, ayant elle-même connu une adolescence difficile. Plus jeune, elle a vendu des beignets dans les rues du quartier populaire de Colobane, tôt le matin, avant d’aller à l’école, pour le compte de la tante qui l’hébergeait à Dakar. « J’ai lancé ma fondation à 22 ans, explique-t-elle, face à l’ampleur du travail à faire pour les femmes et les enfants… À force de leur parler, on y arrivera ! »

En mars 2010, elle a rassemblé tout le gratin de la musique africaine pour un concert à Dakar, au bénéfice des victimes du séisme en Haïti. Aujourd’hui, elle s’apprête à monter son groupe média, en commençant par une radio généraliste, qui diffusera beaucoup de musique, des bulletins d’information, des débats, mais aussi des programmes centrés sur la femme et l’enfant. Star chez elle, comme son cousin Youssou Ndour, devenu un grand patron de presse, elle provoque un vif émoi et de grands sourires dès qu’elle met le pied dans un supermarché. « Coumba ! C’est grâce à toi que je suis restée noire ! », lui lance une caissière, qui lui fait savoir qu’elle a refusé comme elle de céder à la mode du khessal – ce blanchiment de la peau à l’aide de produits chimiques qui laisse des traces cruelles sur bien des visages…

Professionnelle, elle aimerait inculquer le culte de la ponctualité et de l’esprit d’initiative à ses collaborateurs, qu’elle se fixe pour mission de « former », même si elle les recrute au niveau bac +5. Elle circule dans une voiture aux vitres teintées et vit sur la côte dakaroise dans une belle villa cubique, qu’elle a elle-même dessinée, et dont les larges baies vitrées plongent sur l’Atlantique. Dans son salon, des portraits de Marilyn Monroe et une photo de Katoucha Niane. Le mannequin international, qui fut sa grande amie et sa protégée, avait joué le rôle principal de Ramata, un long-métrage de Léandre-Alain Baker tourné au Sénégal, avant de disparaître en 2008 dans des circonstances aussi tragiques que mystérieuses, noyée dans la Seine, à Paris. Coumba Gawlo retient sa peine et ne veut pas s’étendre sur ce sujet. Elle protège jalousement son image et sa vie privée. « J’ai une vie bien trop rangée pour intéresser la presse people », sourit cette célibataire, que tous ses compatriotes aimeraient voir mariée. Elle en joue dans ses chansons : « Qui frappe à ma porte ? », lance l’un de ses derniers titres… Sur scène, elle éconduit les nombreux prétendants qui se présentent devant elle, spontanément, dès qu’elle entonne ce refrain !

Sophistiquée en ville, elle se dévoile sous un jour bien plus naturel chez elle : sans fard et sans talons, en wax ou simple jean, elle redevient cette Sénégalaise presque ordinaire, qui explique « attendre l’homme de sa vie ». Une diva et chef d’entreprise exigeante, donc, mais qui aime plaisanter avec sa mère, s’excuse pour quelques instants à l’heure de la prière, se fait servir du tiep bou dien le midi et suit de près les études de ses trois filles adoptives : Rokhaya, Dior et Perle, respectivement étudiante, collégienne et écolière.