Aller au contenu principal
Jain

Pop à tam-tams battants

Par Sophie Rosemont
Publié le 20 février 2016 à 12h17
Share

Son premier album, Zanaka, est un succès porté par une musique nourrie de ses nombreux voyages en Orient et en Afrique. À 23 ans, Jain a encore un joli chemin devant elle.

Ce premier album réalisé par Yodelice lui a valu d’être surnommée « la Lily Allen française ». Il est vrai que sa pop multicolore, sa bonne humeur et ses mélodies plus profondes qu’il n’y paraît rappellent l’interprète anglaise de « Smile ». Dans Zanaka, on retrouve beaucoup des lieux où a vécu Jain (Jeanne de son vrai prénom), entre Abu Dhabi et le Congo, le tout nourri d’un mélange de pop, de soul, d’électro et de reggae, sans oublier les nombreux échos africains. Résultat, ce premier album s’est déjà vendu à plus de 300 000 exemplaires. Un carton plein en ces temps de crise du disque.

AM : Vous avez beaucoup voyagé depuis votre plus tendre enfance. Pouvez-vous nous retracer votre parcours ?
Jain : Je suis née à Toulouse et j’y ai vécu jusqu’à mes 3 ans. Puis ma famille s’est installée à Pau, où j’ai commencé à faire de la batterie pendant deux ans, au conservatoire local… À mes 9 ans, nous sommes partis pour Dubai pendant trois ans, puis nous avons vécu en République démocratique du Congo (RDC), jusqu’à mes 16 ans. Je suis alors repartie pendant un an à Abu Dhabi, où j’ai passé mon bac. À 18 ans, je suis venue à Paris pour étudier l’art aux ateliers de Sèvres. Je ne savais pas encore si je voulais être artiste plasticienne ou musicienne…Avez-vous continué à apprendre la musique à l’étranger ?Oui, car j’étais curieuse de découvrir ce qui m’entourait. À Dubai, j’ai rencontré des musiciens incroyables qui m’ont enseigné le tabla et la darbouka. J’ai toujours beaucoup écouté la radio locale, qui diffusait un mélange de musique traditionnelle et occidentale. En Orient, les sonorités sont très différentes, les gammes d’accords ne sont pas les mêmes, les rythmes non plus…

Et c’est au Congo que vous avez écrit votre première chanson…
Oui ! J’avais ressenti ce besoin de m’exprimer car je ne me sentais de nulle part : ni française, ni africaine, et ce sentiment de déracinement m’a donné envie d’écrire. J’ai appris à jouer de la guitare en autodidacte puis j’ai écrit ma première chanson. J’avais 16 ans.

Ensuite, il y a eu une étape rapide à Abu Dhabi, pour votre bac ?
J’y ai surtout formé mon premier groupe, The Macumbaz ! Nous faisions des reprises de Nina Simone ou de Lady Gaga, c’était pour s’amuser avant tout… Mais je continuais à écrire mes chansons chez moi, seule.

Votre environnement vous a-t-il influencée ?
J’ai toujours été touchée par les rythmiques exotiques, et vivre au Congo a confirmé cet amour. La vision de la musique en Afrique est différente de celle qu’on a en Europe,   car elle fait partie de la vie de tous les jours. J’ai eu envie de retrouver cette joie et cette générosité dans mon album.

Et un certain éclectisme ?
Oui, absolument. J’essaye de mélanger les frontières et les genres, de ne pas rentrer dans une seule case. J’aime Salif Keïta, Youssou N’Dour, Oumou Sangaré, Fela Kuti… mais aussi Nina Simone, Janis Joplin, ou encore Pink Floyd !

Comment avez-vous commencé à enregistrer vos chansons ?
J’ai rencontré Monsieur Flash, un beatmaker congolais, qui m’a encouragée et donné mes premiers logiciels afin que je puisse m’enregistrer chez moi et partager mes titres sur MySpace. C’est ainsi que j’ai été repérée par mon manager, puis par le producteur musicien Maxim Nucci. Cela semblait naturel de travailler avec lui, mais je voulais être sûre de ce que je voulais faire de ma vie. Je suis revenue vers lui vers mes 22 ans, après mon passage en école d’art. J’étais plus mature, et j’avais choisi la musique !

Pourquoi avoir appelé votre album Zanaka, enfant en malgache ?
C’est d’abord un petit clin d’œil à ma maman, métisse malgache. Et puis ce disque, c’est à la fois mon enfant et un témoignage de ces années passées à écrire des chansons dans ma chambre, ici et ailleurs.

Dans Zanaka, on peut écouter « Makeba », un hommage vibrant à Miriam Makeba. Une de vos références ?
C’est le genre d’artistes qui a fait toujours partie de ma vie car je l’écoute depuis petite, ma mère l’aimait beaucoup. C’est comme la madeleine de Proust… En grandissant, j’ai découvert une femme incroyable. Attristée de savoir que les personnes de mon âge ne connaissaient pas Miriam Mabeka, j’ai écrit cet hommage 2.1.

L’excellente réception de ce premier disque et vos nombreux concerts peuvent-ils laisser envisager un second album ?
Nous sommes en train de faire des nouveaux morceaux pour la prochaine tournée, en mars… Et je réfléchis à un second album, toujours avec Yodelice. Il sera aussi éclectique et dansant. Pour moi, c’est vital. Ce que j’aime sur scène, c’est voir bouger les gens ! Cela doit venir de mon enfance…Jain, Zanaka (Sony). En concert dans toute l’Europe, au Printemps de Bourges le 13 avril, à la Cigale le 11 mai.