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Politique

Ras al Khaimah, l’autre émirat

Par Michael.AYORINDE - Publié en février 2011
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Afrique Magazine : pourquoi avoir créé Rakia en 2005 ?
Dr Khater Massaad : Son altesse Cheikh Saud Bin Saqr al Qassimi, Prince héritier nommé en juin 2003, se demandait comment développer Ras al Khaimah (RAK), un émirat qui n’a de ressources ni en gaz, ni en pétrole. Il dispose de quelques minerais, essentiellement du calcaire, ce qui explique que l’industrie du ciment s’y soit développée depuis longtemps. Le Cheikh Saoud a par ailleurs fait la promotion de la céramique à travers Rak Ceramics, la plus grande fabrique au monde de ce produit, dont je suis le directeur. Ceci étant entendu, nous avons souhaité nous concentrer sur deux pôles : l’industrie et le tourisme. Nous avons souhaité capitaliser sur le succès de Rak Ceramics afin d’attirer d’autres investisseurs industriels. Le prince a alors créé Rakia, dont il m’a nommé directeur. Il nous a accordé une zone industrielle d’environ 10 millions de m², dont 3 millions de m² de zone franche. Nous l’avons aménagé en y construisant des routes et toutes les infrastructures nécessaires. En l’espace de deux à trois ans, nous avons attiré environ 2 milliards de dollars d’investissements et plus de 1000 sociétés étrangères, d’Europe, d’Inde ou des Etats-Unis. D’autres projets ont par la suite été confiés à Rakia, comme le développement de l’île Marjane, puis celui d’un autre parc industriel de 28 millions de m², que nous aménageons actuellement afin qu’il puisse recevoir des sociétés d’ici deux à trois mois. En terme de tourisme, nous avons beaucoup appris du modèle de Dubaï et Abu Dhabi mais nous avons nos spécificités. Nous avons certes la plage, le désert, la montagne… mais nous avons aussi l’histoire. Nous abritons quinze sites historiques à RAK, dont un site de tombes d’environ 6000 ans, le plus vieux de la presqu’ile arabique.

Comment attirez-vous les investisseurs ?
Dr Khater Massaad : Nous leur laissons une liberté totale. Les sociétés étrangères peuvent venir avec leurs ouvriers, nous leur donnons des permis de travail. Elles ne payent aucune taxe et aucun impôt. Tout ce qu’elles gagnent peut être rapatrié…

Quel intérêt pour RAK ?
Dr Khater Massaad : Le PIB ! Toutes les sociétés qui viennent à RAK vont développer le PIB. Elle vont dépenser de l’argent localement, utiliser les transports, les services téléphoniques, les supermarchés… Elles vont créer de l’économie, et c’est ce que nous recherchons. Elles vont aussi créer des emplois car, à long terme, toutes ces industries que nous tentons d’attirer vont employer des locaux.

Avant Rakia, existait-il des problèmes de chômage pour les quelque 200 000 habitants de RAK ? La proportion d’étrangers dans la population totale était-elle la même que dans le reste des EAU, qui est estimée entre 80 et 90% ?
Dr Khater Massaad : Non, il n’y avait pas de problème particulier de chômage. Il y a encore cinq ans, la proportion locaux/étrangers était d’environ 50-50, mais elle augmente aujourd’hui en faveur des étrangers car le business augmente.

Comment RAK a-t-il passé la crise ?
Dr Khater Massaad : L’émirat n’a pas réellement été touché, du fait de son développement industriel, malgré le fait que les sociétés exportent énormément. La majorité des industries présentent à RAK ont pu garder leur productivité, nous n’avons pas senti de baisse.

RAK Ceramics, que vous dirigez, dispose d’une unité de production au Soudan. Pourquoi ce pays ?
Dr Khater Massaad : La taxe douanière y est de 130% ! Nous avons donc estimé qu’il serait intéressant d’installer une fabrique dans ce pays qui dispose de gaz, de matières premières et d’un marché de 25 millions d’habitants. La fabrique tourne bien.

Rakia s’est également investi dans d’autres projets à l’étranger…
Dr Khater Massaad : Rakia n’investi pas directement, elle attire les investissements à RAK. Elle peut participer à certains projets, dans l’émirat, mais généralement de façon minoritaire. En revanche, elle aide les sociétés de l’émirat dans leurs démarches à l’extérieur. Nous avons investi en Afrique, essentiellement en RDCongo. RAK Ceramics y exploite le cuivre dans le cadre d’une participation avec une société locale. Nous disposons également d’une unité de production de gravier, constituée avec Rak Minerals, qui est active depuis six mois. Elle produit environ 1000t/jours. Il y a une forte demande pour ce produit dans le pays. Une autre compagnie, Hydro-force, établie entre Rak Ceramics, Rakia et un partenaire local, produit de l’électricité hydraulique depuis trois mois, et nous souhaitons augmenter notre capacité. Tout est vendu immédiatement. Enfin, la société d’immobilier Rakeen est en train de construire un centre commercial, une tour de bureaux et une autre d’appartements à Kinshasa. C’est un projet d’environ 250 millions de dollars, réalisé en partenariat avec le gouvernement. Un autre projet prévoit la création d’hôtel 5 étoiles de 350 chambres, d’une tour d’appartements et d’un centre de conventions pour 3500 personnes. C’est très important car le pays a besoin de telles infrastructures.

Ces succès vous poussent-t-ils à continuer à investir dans la région ?
Dr Khater Massaad : Absolument. Rakeen a déjà acheté un terrain de plus d’un million de mètres carrés, à Kolwezi, dans une région minière, pour y construire un golf et des villas. Il y a une forte demande dans cette région où sont installées de nombreuses sociétés minières internationales.

Etes-vous présent au Maghreb, où beaucoup de vos voisins sont engagés ?
Dr Khater Massaad : Le problème est que nous sommes peut-être arrivés un peu tard. Maintenant, avec cette crise, c’est un peu difficile de prédire. Je pense que nous réfléchirons au début de l’année prochaine à de nouveaux investissements. 

Par Saïd Aït-Hatrit

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